LES OISEAUX AU MUSÉE (3)
Cet article fait suite aux articles “ LES OISEAUX AU MUSÉE” publiés en juillet 2023
Des tableaux pour partitions.
Cette nouvelle saison m’a fourni l’occasion de réaliser plusieurs petites créations sonores sur la question de la représentation des oiseaux dans les peintures du Musée des Beaux-Arts de Lyon, pour la mise en place d’un parcours thématique par le biais des audioguides. Les textes sont dits sur des fonds sonores se présentant, dans certains cas, comme de véritables petites compositions et, dans d’autre cas, fournissant de simples exemples sonores illustrant ou complétant le texte. Dans tous les cas, le tableau en lui-même m’offre un modèle à suivre le plus fidèlement possible… En ce sens nous pouvons affirmer que le tableau devient pour moi la partition d’une création sonore.
Une fois encore, je tiens à remercier le Musée pour son accueil et la mise à disposition de toutes une précieuse documentation qui m’est très utile pour la rédaction de ces articles.
Prendre un tableau pour partition, d’une certaine manière, c’est créer la “bande son ” du tableau. C’est surtout tenter, à la lecture des images, de restituer des impressions auditives, des couleurs, des rythmes, des densités pour accompagner l’auditeur dans une lecture de la composition du tableau. Cela revient aussi à orienter son regard, souligner certains détails à ses yeux. Il faut alors de se mettre au service de la toile, avec transparence, tout en sachant que, naturellement, il s’agira toujours d’une forme d’interprétation. Composer à partir un tableau, c’est enfin introduire du temps, de la durée, dans un regard souvent trop rapidement posé sur une image fixe.
La musique se manifeste par du son en mouvement, évoluant dans le temps. Sans durée pas de musique. Le tableau, quant à lui, est fixe, immobile, invariable alors que bien souvent et paradoxalement, l’art du peintre consiste à évoquer le mouvement, la vitesse…
L’écoute propose une durée au regard et à la contemplation, elle ralenti considérablement le visiteur.
MER AGITÉE À ÉTRETAT
1883 Huile sur toile
Claude Monet
Paris, 1840 – Giverny (Eure), 1926
De tous les peintres impressionnistes, Claude Monet est celui qui a été le plus attiré par l’atmosphère changeante des paysages de bords de mer, en particulier ceux de Bretagne ou de Normandie.
Cette vue d’une plage cadrée depuis la fenêtre d’un hôtel est celle d’Étretat que Monet peint en série en février 1883. Il séjourne alors dans le village avec le projet de mener à bien un grand tableau représentant les falaises. Celui-ci n’aboutira pas, mais l’artiste réalise une trentaine de toiles consacrées à ce seul motif, dont celle-ci est la plus ambitieuse et la plus grande par son format. Vision hivernale, par gros temps : au premier plan, deux pêcheurs près de leur barque et trois caloges occupent le mince espace dévolu au port d’échouage des bateaux. Devant le rideau de pluie qui strie le ciel au loin, se détache la forme pittoresque de la falaise, les touches horizontales du pinceau soulignant les strates de la pierre. Sous l’effet d’un vent violent, les vagues nacrées traitées en boucles rapides et vibrantes envahissent la partie centrale du tableau.
(Si Monet s’adresse à l’œil c’est pour nous parler de lumière. S’il s’adressait à l’oreille qu’entendrions-nous ?)
Le texte de l’audio guide :
La MER AGITÉE À ÉTRETAT est tout naturellement sonore, envahissante, rugissante…
Les falaises abritent un grand nombre de colonies d’oiseaux marins nichant dans les anfractuosités.
Tout est mouvement.
Mouvements des oiseaux, du ciel (le vent), mouvements des vagues, et rafales de pluie.
Les deux pêcheurs présents près de leurs barques doivent hurler pour se comprendre…
À côté d’eux, sur la plage, les caloges, anciens bateaux côtiers que les pêcheurs ont recouverts d’un toit de chaume, nous indiquent une fréquente activité de pêche, ainsi que la présence d’oiseaux piscivores étroitement liés à l’abondance de poissons.
Nous entendons principalement :
– des mouette tridactyles en vol (chassées par la fréquentation)
– des goélands argentée nichant dans les falaises, des goélands bruns rares.
– des goélands marin possible
– occasionnellement des fulmars boréaux.
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Temps gris, Marais de La Burbanche (1868)
Adolphe Appian
Huile sur toile. Hauteur en cm : 71,8, Largeur en cm : 133,6
Nous avons déjà présenté ce tableau dans un article précédent, voir le lien en tête de la page:
En revanche, le paysage sonore n’avait pas été spécialement composé pour l’audio-guide, ni pour servir de support au texte mais plutôt pour servir de support à des conférences ou être mis à la disposition des auditeurs après une visite.
Pour les audio guides il était nécessaire de s’adapter à la durée moyenne qu’un visiteur accorde à un tableau : trois minutes au maximum.